20 avril 2012

« Je travaille pour 4 euros l'heure. »

Suite à ce constat, silence. Non, il ne s'agit pas d'un ouvrier du textile à l'étranger, mais de Kévin Charnay, un homme qui s'est reconverti en agriculteur après ses études d'anglais. A l'Hybride, lors d'une diffusion du film Cultures en Transition, il précisé : « Je fais ça pour vous. »

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Pendant la semaine du développement durable, j'ai eu la chance de m’asseoir avec Kévin pour parler de sa vie et de ses convictions. Il m'a d'abord expliqué comment il a pris la décision de devenir producteur de fruits et légumes. Dès son adolescence, il s'est penché sur les questions sociales et environnementales, y compris l'alimentation. Il a cherché à soutenir des paysans autour de lui, selon lui « afin de mettre un visage sur les produits que je mange. »
Mais là, il a découvert quelque chose de gênant pour lui.
Ses voisins qui vendaient des légumes les traitaient avec des produits chimiques, et celui qui faisait des produits laitiers nourrissait ses vaches au soja OGM. Étant exigeant, il s'est tourné vers l'agriculture biologique, mais qui n'était pas locale. Pour Kévin, c'est important non seulement de manger bio, mais de soutenir une agriculture à taille humaine. Puisque les agriculteurs autour de lui ne se convertissaient pas en bio, il a décidé d'en faire lui-même. Maintenant il tient une ferme de 2,5 hectares à 15 km au sud de Lille, où il cultive 30 légumes et 8 fruits différents. Il y travaille non-stop de janvier jusqu'à Noël.

De mon côté, des agriculteurs dans ma famille disent que l'agriculture biologique n'est pas réaliste, que les prix de l'alimentation serait beaucoup trop élevé, qu'il aurait de la famine. Et beaucoup de consommateurs disent que « le bio », c'est trop cher. Quand j'ai posé cette question à Kevin, il m'a d'abord conseillé un livre: L'agriculture biologique peut nourrir la planète. Puis, il a admis que ça peut être un peu plus cher, mais c'est parce que l'agriculture bio demande de la main d’œuvre. Depuis des années maintenant la France souffre d'un problème de chômage, ce serait une façon de créer de l'emploi. Chaque année, il embauche de plus en plus de travailleurs saisonniers agricoles, et il prend aussi des stagiaires.

Pour vendre sa production Kévin emploie le système d'Association pour le Maintien d'une Agriculture Paysanne (AMAP) qui aide à éviter ce problème de prix surélevé. L'AMAP lui permet de vendre ses produits alimentaires directement au consommateur. Dans une AMAP, l'agriculteur livre ses paniers des produits de la ferme en ville, près des consommateurs (Kévin s'installe sur la rue de Solférino une fois par semaine). Le consommateur profite des produits très frais et moins chers. De son coté, le consommateur s'engage à prendre un panier au producteur une fois par semaine, et donc le producteur sait à l'avance combien il va vendre. L'agriculteur y trouve une sécurité et évite aussi de gaspiller ses ressources. Le consommateur, s'il souhaite, peut aussi aller sur la ferme pour donner un coup de main de temps en temps. On soutient alors directement ses voisins et on en profite pour avoir une meilleure alimentation moins coûteuse car - ce qui est un autre fait mentionné dans le film Cultures en Transition - les légumes perdent leur valeur nutritive avec le temps du transport. Il y a tant de demandes pour son AMAP que Kévin à une liste d'attente. Mais il y en a d'autres dans la région. Sur le site http://www.amap5962.org/ se trouve la liste des AMAPs du Nord-Pas de Calais, qui inclus des producteurs de fruits et légumes, mais aussi d'œufs et de viande. Ils sont tous biologiques ou en transition vers la production bio.

C'est certain que de faire et de soutenir l'agriculture biologique et locale peut demander un peu d'effort, de temps et d'argent. Mais pourquoi doit-on vivre dans un monde où les gens ne se posent pas trop de questions quand ils rachètent encore un ordinateur ou un forfait mobile, alors que l'agriculture bio est considérée comme compliquée ? Si on a les moyens financiers pour un mobile, c'est certain qu'on a les moyens de s'alimenter de produits faits de manière saine de notre voisin. Il suffit de savoir que ça existe, de s'informer, et de s’entraider. C'est un choix à faire, tout dépend des priorités qu'on a. Kévin avoue que c'est le soutien de son AMAP et des bénévoles sur la ferme qui lui permet de survivre : « Ça me donne la force de continuer. »

Laura Deavers, étudiante en Master à Lille 3


Le site de la Ferme du pommier : http://www.lafermedupommier.com/

Kévin trouve aussi des bénévoles pour sa ferme grâce au programme WWOOF (World Wide Opportunities on Organic Farms), qui permet de faire du bénévolat sur des fermes biologique partout le monde.
WWOOF France : http://www.wwoof.fr/
WWOOF International : http://www.wwoof.org/

Lien au site AMAP Nord : http://www.amap5962.org/

L'agriculture biologique peut nourrir la planète (un documentaire Arte) :

L'agriculture biologique peut nourrir la planète... par supervielle

Commentaires

Bonjour,

Je connais ce producteur, je déconseille de s'inscrire dans son AMAP, ses légumes sont de très mauvaise qualité...

Écrit par : marie | 31 octobre 2013

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